Quatre mâts envisagées sur la crête
Suite aux dégâts de la tempête de décembre 1999, le Maire de l’époque, convaincu du potentiel de vent, envisageait l’installation de deux éoliennes sur son ban communal, plus précisément sur le sommet du massif du Hohbuhl.
Cette proposition adoptée par le conseil municipal, EDF Énergies Nouvelles – filiale d’EDF dédiée aux énergies dites renouvelables -, s’engouffrait aussitôt dans la brèche.
C’est alors un projet industriel de quatre éoliennes de plus de 100 mètres de haut en plein milieu naturel qui était alors mis sur la table.
Des sentiers existants deviendraient ainsi des voies d’accès de plus de cinq mètres de large, des centaines de tonnes de béton seraient coulées dans la montagne et un paysage emblématique du massif vosgien alsacien serait ainsi profondément modifié.
Le lieu d’implantation envisagé se situait sur le versant sud-ouest de la chaume, en contrebas de la crête du petit Rosskopf, à une altitude d’environ 800 mètres. Un coin de forêt en partie touché par la tempête de 1999. Le « parc » se constituerait de quatre mâts, de 64 m de haut, hauteur à laquelle il fallait ajouter la longueur des pales, soit un total 99,50 m !
« Au Hohbuhl, nous sommes sur une partie sommitale, en présence de l’une des plus importantes chaumes secondaires du Bas-Rhin. Ces chaumes sont nées du fait de l’homme, il y a plusieurs centaines d’années, par défrichement et mise en pâture. C’est un milieu sensible, emblématique du paysage et visible à des kilomètres à la ronde », relevait en 2007 Jean Friess, alors secrétaire général bas-rhinois de la Fédération Alsace Nature. Au-delà d’une « déconstruction » du paysage, il craignait une forte dégradation du milieu naturel et du paysage, du fait de l’aménagement de voiries pour l’implantation des mâts ainsi que d’une éventuelle surfréquentation touristique. En effet, le Hohbuhl abrite une grande richesse faunistique et floristique.
Création d’Arppege
Lors d’une réunion publique courant de l’année 2007, des participants annonçaient la création d’ une association dédiée à l’opposition au projet et déclaraient : « Nous entreprendrons toutes les démarches pour empêcher ce projet d’éoliennes. »
Ce groupe de citoyens, habitants du secteur et amoureux de la région, se constitua alors en association pour contrer le projet : c’était la naissance d’Arppege. Loin de manifester une opposition de principe à l’éolien, il s’agissait de mettre en lumière l’absurdité d’une telle installation en remettant en cause ses prétendus bénéfices et en pointant les dégâts irrémédiables engendrés sur le paysage, la faune et l’avifaune, la chaume du Hohbuhl et son paysage exceptionnel.
Arppege était née !
Un long combat s’engageait alors aux côtés de la fédération Alsace Nature pour défendre ce joyau naturel du village et de l’Alsace.
Un paysage emblématique et un milieu naturel sensible
Soutenue par Alsace Nature, notre association tenait à dénoncer l’absurdité du projet.
- Situation à l’extrême proximité d’une chaume secondaire menacée de dégradation.
Contrairement à ce qui était dit dans les documents du projet, il y avait un fort risque de détérioration des chaumes à cause d’une surfréquentation induite par la présence des éoliennes, rendant tout effort ou volonté de préserver ces chaumes caduc. La chaume du Hohbuhl se situe en effet tout juste en dessous du parc projeté et reste le chemin le plus court pour accéder à la crête. - Dégradation paysagère lié à une implantation en ligne de crête, dans une forêt ancienne.
- Dégradation environnementale. Le site, en plein milieu naturel, abrite de nombreuses espèces d’oiseaux et de mammifères, tels que la chouette de Tengmalm, le criquet sténobothrus stigmaticus (typique des chaumes et pâtures, en voie progressive d’extinction en Europe) ou diverses espèces de chiroptères protégées par la réglementation nationale.
- Aucune étude d’impact sérieuse n’avait été menée alors même que l’arrêté du 23 avril 2007 (fixant la liste des mammifères terrestres protégés sur l’ensemble du territoire Français et les modalités de leur application précise), précise que sont interdits « la destruction, la mutilation, la capture ou l’enlèvement, la perturbation intentionnelle des animaux dans le milieu naturel » ainsi que « la destruction,l’altération ou la dégradation des sites de reproduction ou des aires de repos des animaux sur les parties du territoire où l’espèce est présente ainsi que dans l’ére de déplacement naturelle des noyaux de population existant ».
- Un bénéfice discutable : quel gain énergétique, sachant l’intermittence de cette source d’énergie et avec quatre seuls aérogénérateurs, en contrepartie d’un monstrueux saccage du site ?
La chaume du Hohbuhl est, avec celle du Champ du Feu, la seule chaume dite secondaire du département : c’est une lande d’intérêt paysager présentant une végétation en mosaïque lui conférant une richesse écologique remarquable. Ajoutant à cela que le massif fait l’objet d’un arrêté préfectoral du 9 juillet 1976 instaurant une zone de silence sur le site.
Alsace Nature et l’État au secours du Hohbuhl
Au final, deux recours juridiques étaient déposés au Tribunal Administratif de Strasbourg, l’un par Alsace Nature et le deuxième par l’État en la personne de son représentant, le Préfet de Région. Recours gagnés en première instance, suivis d’un jugement de la Cour Administrative d’Appel de Nancy qui avait alors été saisie par la Commune de Grendelbruch et qui rendait un verdict sur le fond, et décidait l’appel de la Commune irrecevable, la condamnant aux frais et dépens.
Le Hohbuhl, son paysage, ses faune et avifaune étaient sauvés !